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Health Data Hub « Il faut coconstruire l’offre du Hub avec les industriels » 

Il y a toujours un intérêt à participer à la recherche en santé : tel est le leit-motiv du Health Data Hub (HDH). C’est donc dans cette optique que la plateforme dédiée aux données de santé en France collabore avec les porteurs de projets dans ce domaine, y compris en imagerie. Grâce à un accompagnement protéiforme (humain, administratif, technologique…), le Hub veut être le partenaire privilégié et incontournable des innovateurs en santé, comme l’explique pour le magazine ARIAS Emmanuel Bacry, directeur scientifique du Health Data Hub.

13/12/2023
Health Data hub fr
Emmanuel BACRY
Directeur scientifique du Health Data Hub

Quels sont les enjeux associés à l’IA et aux données en imagerie ?

Emmanuel Bacry : Sans aucun doute, l’imagerie a joué un rôle précurseur et c’est clairement dans cette spécialité que l’Intelligence Artificielle en santé a commencé sa percée. Et en pratique, l’IA y montre de nombreuses applications – déjà effectives ou potentielles – ainsi que des résultats impressionnants. Les enjeux sont particulièrement importants en matière d’aide au diagnostic mais aussi en prévention. L’imagerie dotée d’Intelligence Artificielle apporte une aide à la décision pour affiner un diagnostic. Il y a également d’évidents enjeux computationnels et techniques, comme en anatomopathologie par exemple. Les algorithmes sont en effet très gourmands et les besoins de stockage, très grands.

Enfin, il faut souligner les enjeux humains associés. Le radiologue joue un rôle central dans l’IA, son développement et son utilisation si bien que l’on a plus que jamais besoin d’experts de la spécialité pour collaborer, entraîner, monitorer et travailler avec ces IA. De fait, on entend beaucoup parler de la fin des radiologues. Je n’y crois pas du tout !

Quelle est le rôle du Health Data Hub en matière de données de santé, dont celles d’imagerie ?

E.B. : Contrairement à ce que certains semblent redouter, le Health Data Hub n’a absolument pas pour objectif de faire main basse sur les données de santé des Français. Ce serait non seulement illusoire mais également contre-productif. Notre vocation et la démarche qui en découle reposent sur la mise en place d’un réseau d’entrepôts de données de santé et leur interopérabilité. En effet, les rôles essentiels de la plateforme du Hub résident dans sa puissance computationnelle et sa compétence en matière de chaînage de données.

Quels sont les obstacles rencontrés et quels leviers permettraient de les dépasser ?

E.B. : Le principal obstacle concerne l’accès aux données de santé, lequel est très complexe. L’attente des industriels de santé (dispositif médical comme médicament) est d’ailleurs très forte en la matière, particulièrement pour des accès plus rapides.

Il y a également d’énormes problématiques d’interopérabilité là où, en imagerie notamment, il faudrait pouvoir comparer des données de différents établissements. Or, ceux-ci n’ont pas les mêmes machines ni les mêmes process d’implémentation. Et plus l’imagerie est complexe, plus on rencontre des problèmes de standardisation. En anatomopathologie, par exemple, très rares sont les centres qui numérisent systématiquement leurs lames alors même que c’est nécessaire pour construire une banque de données. Mais c’est effectivement très coûteux. Pour contourner ces problèmes d’interopérabilité, une stratégie nationale est nécessaire.

Quelle place les projets liés aux données d’imagerie occupent-ils au sein du Hub ? 

E.B. : Quatre-vingt-neuf projets sont accompagnés sur la plateforme du Hub et environ 1 sur 8 contient de l’imagerie. C’est dire la place que cette spécialité occupe ! Parmi eux, nous pouvons citer les programmes UNIBASE qui a pour objectif de créer en trois ans une base de référence en cancérologie en collaboration avec Unicancer ; DEEP-PISTE qui porte sur l’analyse d’un très gros volume de données de mammographies pour améliorer le dépistage du cancer du sein ; INNERVE mené avec l’AP-HP pour affiner le diagnostic des neuropathies grâce à un logiciel s’intégrant directement au scanner ; NHANCE qui développe un outil d’aide à l’interprétation des échographies pour les organes abdominaux pour un diagnostic plus précoce et plus fiable ; ou encore DAICAP qui porte sur l’IRM prostatique avec cinq CHU partenaires. Si, à ce jour, les projets portent essentiellement sur le dépistage et le diagnostic, nous cherchons à développer la prévention.

Comment le HDH intervient-il dans ces projets ?

E.B. : Son intervention est différente selon les projets. Les principales missions d’accompagnement du HDH vont porter sur le cadrage du projet, les autorisations juridiques et/ou l’appariement de données, notamment avec le Système national des données de santé (SNDS). Mais il peut également apporter son aide pour le conventionnement, le transfert des données et/ou leur pseudonymisation.

Et bien sûr, il met à disposition sa plateforme, sa puissance computationnelle et ses outils. En effet, la plateforme du HDH est l’une des plus sécurisées de France avec un long processus de certification des outils et des algorithmes. Par ailleurs, notre offre logicielle, qui s’accroît avec le temps, est disponible dans sa grande majorité en open source afin que cela profite à tous. Enfin, nous pouvons également accompagner pour la valorisation des résultats, la communication, etc.

Quels liens unissent le Health Data Hub aux industriels et aux professionnels de santé de l’imagerie ? 

E.B. : Tout d’abord, des représentants des industries de santé font partie de la gouvernance de deux groupes de travail du HDH. Nous faisons également beaucoup de mise en relation en permettant à nos partenaires de trouver l’expertise dont ils ont besoin. C’est vraiment l’un de nos cœurs de métier que de mettre en contact chercheurs, start-up, industriels etc.

Par ailleurs, plus de la moitié des projets accompagnés par le HDH comporte un partenariat avec des industriels, lesquels sont parfois porteurs du projet lui-même. Mais, si les start-up sont très présentes, les grands groupes ne le sont peut-être pas encore assez. Nous allons d’ailleurs organiser une journée start-up à PariSanté Campus où la mise en relation entre grands groupes et start-up aura une part très importante. L’objectif est également d’aider les start-up qui ont peu de visibilité, notamment pour la contractualisation et le déploiement de leurs outils.

Quelles sont les conditions de ces collaborations ?

E.B. : Que cela soit avec les industriels et/ou les équipes de recherche, sous forme d’appels à projets ou de partenariats, la condition sine qua non est qu’il y ait un intérêt public de l’application du programme, c’est-à-dire un bénéfice pour le patient. Il faut également que ce soit en open source et transposable a minima par l’écosystème académique par la suite, que les données de santé puissent être réutilisées de façon très large et que les algorithmes puissent également être en open source. A noter que les industriels gardent la propriété intellectuelle de leurs outils dans les appels à projet.

En tant que directeur scientifique du HDH, quel message souhaiteriez-vous adresser à ces acteurs de santé ?

E.B. : Nous ajustons en permanence l’offre du HDH, laquelle doit être coconstruite avec les industriels. C’est pourquoi nous sommes toujours en recherche de collaborations avec ces derniers. L’objectif ? Partir de programmes précis pour élaborer avec eux des outils génériques qui bénéficieront à l’ensemble des acteurs du système de santé. Et pour ce faire, les partenariats entre les professionnels de santé, les entreprises et le HDH sont essentiels.

Le Health Data Hub, au service des données de santé 

Aussi appelé Plateforme des données de santé, le Health Data Hub (HDH) a été créé en novembre 2019 pour faciliter le partage des données en répondant aux défis posés par l’Intelligence Artificielle dans le domaine de la santé.

Ce groupement d’intérêt public a pour principales missions de valoriser les données de santé, particulièrement pour leur usage secondaire à des fins de recherche, participer à étoffer les bases de données de santé, notamment via le SNDS et travailler avec ses partenaires à préfigurer un espace européen des données de santé. Le HDH agit également comme un guichet unique pour les porteurs de projet dans ce domaine.