125 ans de rayons X : une histoire de pur hasard, de sous-vêtements et la percée du « patient de verre »

27.01.20
Wilhelm Conrad Röntgen
Wilhelm Conrad Röntgen (copyright: German Röntgen Museum)

Imaginez-vous que vous faites une mauvaise chute et que vous arrivez aux urgences avec une fracture de la jambe. Il y a plus d’un siècle, le médecin aurait alors palpé la jambe pour déterminer l’importance et la localisation exacte de la fracture. À l’heure actuelle, ce serait impensable… Grâce au professeur Wilhelm Conrad Röntgen, qui a découvert les rayons X, rayons « ionisants » il y a 125 ans. Tout à coup, il devenait possible de voir à travers des matériaux et le corps humain. La découverte fut d’abord accueillie avec scepticisme, mais provoqua rapidement une révolution dans de nombreuses disciplines scientifiques, dont la médecine.

Le XIXe siècle est connu comme le siècle d’or des inventions scientifiques. Il suffit de penser aux premiers vélos, machines à écrire, avions, voitures, réverbères, photographie, et bien d’autres. C’est en novembre 1895 que Wilhelm Conrad Röntgen découvrit par hasard, lors d’une expérience une gamme de rayons qui n’étaient arrêtés que par un très petit nombre de matériaux. Après sept semaines d’expérimentations avec ses nouveaux rayons X, dans lequel « X » représente une inconnue, le physicien annonça sa découverte au monde entier. Elle fut accueillie avec incrédulité par ses collègues scientifiques.
 

Le scepticisme initial fut rapidement balayé du fait que ses expériences pouvaient être reproduites facilement. En 1896, le monde connut une véritable « phobie » des rayons ionisants. Des entreprises développèrent des sous-vêtements opaques aux rayons X, un journal new-yorkais écrivit très sérieusement que les rayons X étaient utilisés pour projeter des diagrammes anatomiques directement dans le cerveau des étudiants. Malheureusement, on ignorait encore les dangers de ce type de rayons, et de nombreux pionniers dans l’utilisation de ceux-ci moururent par suite d’expositions excessives.

Premier appareil rayons X
Premier appareil rayons X

Chaque jour étaient publiés des résultats d’examens réalisés sur tout type de matériaux avec des idées de développements futurs. Depuis les portefeuilles jusqu’aux momies en passant par les meubles, tout fut passé par les rayons X. Mais l’objet d’étude par excellence était le corps humain : pour la première fois dans l’histoire de la médecine, le rêve du « patient de verre » devenait réalité. Les rayons X signifiaient une amélioration considérable du confort du patient et les procédures médicales furent bouleversées d’un jour à l’autre.

Pendant ces premières années, l’expérience du patient était différente de celle d’aujourd’hui. À cette époque, les appareils de radiologie étaient constitués de différents composants qui étaient à peine isolés et qui étaient reliés entre eux par des câbles électriques. Chaque acquisition provoquait un véritable feu d’artifice et se terminait par un puissant éclair lumineux. À l’origine, seuls les médecins qui n’avaient pas peur d’expérimenter se risquèrent donc à utiliser cette installation.

Pantix Tube
Pantix Tube, tube à rayons X composé d’une anode rotative en forme de disque

Dans les années 1920, la technologie était déjà utilisée depuis un certain temps à des fins cliniques, et on développa donc de plus en plus d’appareils. Les progrès technologiques ne se firent pas attendre. De nouveaux appareils permettaient ainsi d’examiner le patient aussi bien assis que debout ou couché, et les tubes Rx servant à générer les rayons ionisants devinrent de plus en plus robustes et fiables. Dès 1933, Siemens & Halske, les fondateurs de l’actuel Siemens Healthineers, ont développé un tube à rayons X composé d’une anode rotative en forme de disque qui est toujours le concept utilisé à l’heure actuelle.

Dans les années 1950, un nouveau chapitre des traitements par irradiation s’ouvrit, le premier appareil qui permit d’irradier des tumeurs profondes dans le corps fut commercialisé. C’est à cette même époque qu’il fut possible de visualiser des images de radiologie à la lumière du jour

La main de l'épouse de Röntgen
La main de l'épouse de Röntgen (copyright: German Röntgen Museum)

Enfin, la durée nécessaire pour obtenir une image de qualité s’est réduite de manière drastique au fil des ans. À la fin du siècle dernier a été commercialisé le premier scanner CT spiralé, dont la vitesse d’acquisition permettait de réduire significativement la perte de qualité due aux mouvements naturels des organes et/ou du patient. Il y a 125 ans, le professeur Röntgen avait besoin de 15 minutes pour scanner la main de son épouse. En 2005, il ne fallait plus qu’une fraction de seconde pour obtenir une image complète du cœur.

SOMATOM Force
SOMATOM Force

Mais l’évolution technologique ne s’est pas arrêtée là. Au cours des dix dernières années, les composants mécaniques et les logiciels des appareils de radiologie se sont perfectionnés sans cesse. À l’heure actuelle, les radiologues sont en mesure de générer des images 3D et obtenir une représentation photoréaliste (cinématique) du corps. Le logiciel se charge aussi des préparatifs d’un protocole, comme la suppression automatique des côtes sur l’image du scan du thorax. Enfin, l’imagerie fait appel à l’intelligence artificielle : il est désormais possible d’analyser et d’identifier automatiquement les organes sur un scan du thorax. Bref, toutes ces évolutions ont contribué à des résultats plus rapides, plus fiables et reproductibles au bénéfice du patient.